Jésus au milieu des bénévoles et des migrants à Calais

Retour d’expérience

Cet été, grâce au soutien matériel et logistique de l’Église du Marais et de l’Eglise protestante unie de Dunkerque, je suis allé à la rencontre des migrants à Calais et Dunkerque pour servir mon prochain au nom de Jésus Christ. J’ai travaillé aux côtés des associations qui oeuvrent localement, trois britanniques et une française, réunies dans deux hangars gigantesques aux abords de Calais.

Un entrepôt sert à la réception, au tri et à la redistribution des dons ; l’autre sert à la préparation des repas. Environ 200 bénévoles, la plupart anglophones, joignent leurs efforts pour préparer 2500 repas chauds par jour. Du riz, des légumes en sauce, parfois du poulet, de la salade sont mis en barquettes et distribués lors de maraudes ou bien sont stockés dans des plats de cantine pour être acheminés vers les points de distribution fixes.

Le travail est incessant de 9h30 à 19h : découpe, cuisson, conditionnement, puis nettoyage des outils et du sol. La pression et grande car les repas doivent « sortir » à 12h et 17h, mais jamais personne ne hausse le ton ; d’ailleurs il n’y a pas de chef, seulement des bénévoles devenus formateurs et responsables qui, malgré leur expérience, participent à toutes les tâches et aident les derniers arrivés.

Pour participer à la distribution, il faut avoir suivi une formation, non pour se protéger des migrants mais pour ne pas répondre aux provocations des CRS encadrant chaque distribution. Même si ceux-ci intimident les bénévoles ou aspergent de gaz lacrymogène les jerrycans d’eau, les tentes et les duvets – comme cela est arrivé pendant mon séjour – un simple geste d’opposition vaudrait à son auteur une garde à vue, publicité négative dont les associations n’ont pas besoin.

En juin 2017, la presse française a souligné l’écart entre le discours humaniste du Président de la république et les pratiques d’une inquiétante brutalité de la part d’une police aux ordres d’un préfet et d’un ministre visiblement soucieux de plaire aux élus de la région. Les associations ont porté plainte collectivement et les tribunaux leur ont donné raison : la distribution de nourriture et de boissons aux plus démunis ne saurait être entravée par la police. Reste bien sûr le problème des nuits : où dormir sans que les forces de l’ordre ne considèrent l’installation comme un campement interdit ?

Avec l’association Salam, moins dotée en bénévoles, j’ai pu participer à une distribution à Dunkerque ; s’y retrouvèrent, entre l’autoroute et un étang, environ 400 Kurdes, de jeunes hommes en majorité, mais aussi quelques familles. Il serait mensonger de parler d’une ambiance détendue – les passeurs font peser un climat plombant – mais chacun, bénévole comme bénéficiaire, fait de son mieux pour éviter les tensions. Au fil des minutes, la relation dominant/dominé s’estompe au profit d’une grâce de service. La présence de Jésus est palpable dans ces moments où malgré le fort volontarisme de chacun, malgré l’étrangeté de cet « étranger » qui veut améliorer sa vie au risque de la perdre, règne une paix venue d’ailleurs. Le bénévole se fait prochain et devient en quelque sorte le samaritain de la parabole de Jésus.

Je profite de ces lignes pour remercier les paroissiens du Marais et de Dunkerque.

Je me demande encore si j’ai aidé ou aggravé le sort de ces personnes, réfugiés politiques ou économiques en transit vers l’Angleterre, hier un Eldorado, aujourd’hui une forteresse gardée par des hélicoptères et les CRS, tant politiquement et économiquement, la question est complexe et clivante. Mais en tant que disciple de Christ, racheté à la Croix, membre d’un royaume qui ne connaît ni frontières ni loi martiale, le choix n’existe pas. Aimons, car nous avons été aimé les premiers.

Si vous voulez en savoir plus sur les moyens d’aider, rendez-vous sur le site de l’Auberge des migrants. Si vous voulez organiser une collecte de vêtements, prenez contact avec la rédaction, car je compte retourner dans le Calaisis prochainement.

Un paroissien

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