Quelles paroles de consolation pour un deuil ?
Par Benjamin
Si vous êtes ici, c’est que vous êtes curieux ou bien que vous souffrez de la perte d’un être cher. Peut-être même qu’en ce moment votre souffrance est immense et vous ne savez plus comment sortir de la tristesse, du manque, de la colère et du sentiment d’injustice. Peut-être que vous accompagnez une personne en deuil et que vous ne savez pas comment l’aider avec justesse.
Je vous donne une première clé : aucune parole de consolation ne peut supprimer la tristesse d’un coup. Dommage ! Ce serait tellement pratique. J’ai si souvent cherché ce bouton magique dans ma vie pour résoudre mes problèmes intérieurs. Mais il n’existe pas. D’ailleurs, il faut se méfier des solutions faciles, toutes prêtes, qui seraient en quelque sorte des tours de magie.
Ainsi, avant d’obtenir la véritable consolation, il faut bien souvent en passer par l’acception. Être en deuil, c’est avant tout accueillir notre souffrance. Cela vous paraitra peut-être étrange, mais il est bon d’accepter nos limites, nos pleurs, notre impuissance. Non pas comme une fatalité qui nous suivra toute la vie. Mais comme un temps à vivre, qui passera. La Bible en parle dans un magnifique texte : “Il y a un temps pour tout (…) Il y a un temps pour pleurer, et il y a un temps pour rire” (Ecclésiaste 3,1-9).
1. Comment oser une parole de consolation ?
Heureusement, au cœur de nos tempêtes intérieures, Dieu place sur notre chemin, sur ton chemin, la consolation et l’amour. Cela passe bien souvent par la présence des autres, par leur attitude et leurs mots. Sans résoudre le puits sans fond de notre désarroi, ces paroles sont des rayons de soleil qui nous réchauffent. Mais parfois, en voulant bien faire, l’autre est maladroit. Alors, quelle est la juste attitude ? Par exemple, avez-vous déjà eu peur de vivre ce genre de dialogue ?
– Comment ça va ?
– Mal
– Ah
– …
– …
Cette situation fait tellement peur, que certains n’osent plus demander « Comment ça va ? » et que d’autres n’osent plus répondre « Mal ». Dans le premier cas, nous sommes embarrassés par la tristesse de l’autre, dans le second, nous ne voulons pas faire porter à l’autre notre tristesse.
Je vous donne une première clé pour contrer la difficulté du “Comment ça va ?”. Cela me vient d’un aumônier protestant accompagnant les personnes en fin de vie à l’hôpital. Il préférait l’usage du “Comment ça va aujourd’hui ?”. Et c’est bien différent. Cette question sous-entend que l’on connait et reconnait la souffrance de la personne en cette période. On veut savoir si aujourd’hui c’est pire qu’hier ou s’il y a du mieux. Et puis, c’est plus facile de dire “Aujourd’hui, c’est pas terrible”. On laisse à la personne la chance de réduire sa souffrance au moment présent, évacuant la fatalité d’une souffrance intemporelle.
Pour le reste, il n’y a pas de paroles idéales. Si ce n’est dans l’attitude et la fidélité. Des petits messages qui n’appellent pas de réponse : “Je pense à toi aujourd’hui, tu n’es pas seul, appelle-moi si tu veux”. Ce genre de phrase… à votre façon bien sûr. Ainsi, on est plus dans le témoignage d’une présence que sur des mots magiques.
D’ailleurs, bien souvent, une personne en deuil qui revient dans son quotidien (amis, travail, Eglise, association) redoute ce moment où tout le monde va la regarder avec tristesse et avoir une série de paroles maladroites. Il faut alors savoir vite entourer la personne autrement, avec simplicité et joie.
2. Dieu : la solution ou le coupable idéal ?
Que l’on soit croyant ou pas, la mort d’un proche nous fait entrer dans les limites de la vie. On est alors rappelé à cette cruelle réalité : l’être humain n’est pas éternel, ni tout-puissant. Et dans le prolongement, le regard de l’être humain cherche quelque chose de plus grand que lui, d’infini, de tout-puissant, rempli d’un amour qui nous manque.
Il me semble qu’il y a là deux réactions courantes : accueillir Dieu (solution) ou entrer en conflit avec lui (nouveau problème). Je ne pourrai pas vous dire pourquoi certains vivent l’une de ces réactions et pas l’autre. C’est mystérieux pour moi. Mais nous sommes rarement indifférents à la transcendance face à la mort. En réalité, ces deux attitudes sont fructueuses si on les accueille.
Dieu comme solution, comme un être d’amour qui se révèle à nous et qui semble nous parler, nous aimer plus particulièrement. Parfois pour la première fois. Cela peut être déstabilisant mais si notre coeur s’ouvre à cette relation, nous y trouverons du réconfort et sans doute un nouveau sens à sa vie. C’est là qu’on peut parler de “grâce”. Un mot du jargon chrétien qui dit le don total et inattendu, immérité, de Dieu. Un torrent d’amour déversé sur nous. On ne va pas être contre ! Mais on peut trouver ça louche et suspect. C’est pour cela que l’accueil de Dieu va souvent de pair avec un certain lâcher prise.
Dieu comme coupable idéal. Au lieu de le voir comme une aide, il serait ce Dieu pervers qui soit disant nous aime mais en réalité laisse nos proches mourir sans rien faire. “Où es-tu Dieu ? Qu’as-tu fait pour empêcher cet accident, cette maladie ? Tu m’as abandonné !”. Étrangement, il est bon de dire ces paroles à Dieu. Il peut tout entendre de nous. Même Jésus, qui dans la tradition chrétienne est à la fois Dieu et le fils de Dieu, a prononcé ces paroles sur la croix, au cœur de son agonie : “Mon Dieu, mon Dieu : pourquoi m’as-tu abandonné ?” (Marc 15,34). Oser dire cela à Dieu est le témoignage d’une intimité profonde avec lui, même si elle paraît soudaine. Crier sa colère à Dieu c’est être en relation avec lui et attendre des réponses de sa part. C’est donc s’attendre à sa présence dans nos vies, même si c’est encore inconscient. Et par expérience, lorsque l’on crie vers Dieu, il nous répond.
3. La meilleure parole de consolation que Dieu nous donne ?
Bonne question ! Dieu nous aime, c’est assez clair dans la Bible et les Églises nous le rabâchent. Mais on veut du concret ! Des paroles et des gestes d’amour ! Et qui marchent s’il vous plaît ! Au fond, on croit avoir besoin de réponses philosophiques sur le sens de la mort et de la vie, alors que nous avons juste besoin d’amour, d’un vrai amour libre et inconditionnel dont Dieu seul est capable.
Alors, comment Dieu nous aime-t-il lorsque nous souffrons ? Quelles sont ses paroles de consolation ? Il y en a plein dans la Bible. Un exemple magnifique dans le livre de Jérémie (31,13) :
“Je changerai leur deuil en joie et je les consolerai, je les rendrai joyeux après leurs chagrins.”
Et vous en trouverez beaucoup d’autres sur Google en tapant les bons mots clés. Mais Dieu a bien mieux que des paroles de consolations consignées dans la Bible. Sa plus belle parole tient dans ce verset le plus court des Évangiles : “Jésus pleura” (Jean 11,35). Il était alors confronté lui-même à la perte d’un de ses amis, Lazare. Entouré de sa famille, Jésus n’a pas prodigué des paroles de réconfort, comme s’il était loin d’être touché par cette mort. Non, la première réaction de Jésus est de pleurer. Ainsi, la plus belle parole de consolation de Dieu c’est de pleurer avec ceux qui pleurent.
Où est Dieu dans ma souffrance ?! Il pleure à côté de toi. Ta souffrance le touche et il la ressent comme si c’était lui qui avait perdu un être cher. Il passe d’un Dieu surplombant, supérieur, au-delà des émotions, à un Dieu qui s’abaisse, nous rejoint et laisse couler ses larmes de Père. Si nous ouvrons nos yeux sur cette réalité d’un Dieu proche et compatissant, alors, nous trouverons auprès de lui un ami. Nous pourrons entrer dans cette relation avec lui à laquelle il nous invite sans jamais nous forcer. Et nous y trouverons ce qu’on appelle le salut. Nous serons sauvés de la solitude de nos tracas terrestres et nous serons également sauvés pour l’éternité.
Parlez donc à Dieu. Criez votre colère ou louez sa présence à vos côtés, mais surtout, parlez à Dieu. Et vous verrez, que dans le silence et l’écoute, il vous parlera à son tour, vous aimera et vous consolera.