Pardonne-nous nos offenses (Notre Père 6)

Prédication donnée au temple du Marais à Paris le 4 novembre 2007

Lectures bibliques :
Psaume 130
Exode 22 :21-28
Matthieu 6 : le Notre Père

Prédication
Pour être franc, j’ignore d’où provient la traduction traditionnelle du Notre Père qui nous fait dire cette phrase « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ». Car dans les paroles de Jésus, aussi bizarre que cela puisse paraître, on ne parle pas que de pardonner et on ne parle pas vraiment d’offenses. Ce que dit le texte grec est beaucoup plus fin et beaucoup plus large à la fois. Jésus dit bien plus que « Pardonne-nous nos offenses », il dit en réalité « Eloigne de nous nos dettes » ou, pour le dire encore d’une autre façon « Repousse loin de nous ce que nous tout ce que devons ».
Demander à Dieu qu’il nous pardonne, cela passe donc par le fait de reconnaître que nous avons une dette envers lui. Et quelle dette ! Avez-vous réalisé l’ampleur de l’ardoise que vous avez laissée dans la comptabilité de l’entreprise Dieu, Père et Fils ? Impressionnant. Même la commission de surendettement ne peut plus rien faire. Car, en toute simplicité, vous lui devez… tout.
Qui a permis que vous soyez vivants ? Qui a permis que votre vie croisse ? Qui a pourvu à vos besoins matériels ? Qui s’est même préoccupé de votre sort après la mort ? Qui a remboursé à votre place des dettes que vous aviez endossées à la va-vite chez Satan et compagnie ?
Quand je dis que vous Lui devez tout, c’est vraiment un minimum. Car vous êtes même endettés sur des dépenses et des mises à disposition qui arriveront dans plusieurs années !
L’offense suprême à l’égard de Dieu, c’est de nier, en parole, en actes ou même en pensée, qu’on lui doit tout. S’il y a une offense que Dieu doit nous pardonner c’est cette ingratitude fondamentale qui consiste à ne pas reconnaître, à ne pas voir, à ne pas réaliser que tout nous vient de lui. Pour cela il faut effectivement demander pardon, pour l’ingratitude.
Mais Dieu ne nous demande pas de nous excuser ou de nous confondre en culpabilité pour le fait que nous lui devions tout. Ca il le sait. La seule chose qu’il demande, c’est qu’on le reconnaisse. La seule chose que Dieu demande en retour de sa grâce infinie, c’est que nous rendions… que pourrions-nous rendre, puisque tout est à lui ? Que pourrions-nous rembourser ? Rien ? La seule chose que nous pouvons faire en retour de sa grâce infinie, c’est de rendre grâce. Nous recevons tout comme une grâce et nous rendons grâce. L’attitude qui prévaut n’est donc pas la culpabilité, l’amertume, ou la honte, mais c’est la joie et la reconnaissance. L’inverse, en somme !

Est-ce que vous connaissez un autre créancier qui demande seulement de la joie en retour des sommes astronomiques qu’il met à notre disposition ? Vous imaginez votre banquier vous offrir 100.000 euros et vous dire que le plan de remboursement consistera à être toujours joyeux, à être dans la reconnaissance, à vous délecter simplement de cette bénédiction ? Incroyable !
Les créanciers du monde ne remettent pas les dettes. Même les parodies de remises de dettes entre nations se soldent toujours par des contrats d’exclusivités et autres mises en esclavages. « Vous ne nous devez plus rien, nous vous sommes reconnaissants de l’exclusivité que vous avez donnée aux entreprises de notre pays pour piller tous vos sous-sols. Votre dette est annulée, donc vos filles sont désormais libres d’aller occuper les trottoirs de nos villes, vos garçons sont désormais libres de venir travailler au noir et sans papiers et même souvent sans salaire sur les chantiers de nos monuments glorieux. Oui, dans notre mansuétude, notre nation a annulé votre dette et la seule mémoire de ce que vous nous devriez vraiment sera évoquée dans toutes nos conversations, plus lourde encore dans les âmes qu’elle ne l’était sur les comptes de nos banques. »

Quand, avec Jésus, nous demandons à l’Eternel qu’il éloigne de nous nos endettements, il s’agit simplement de reconnaître que Dieu seul peut nous libérer de ce que nous devons aux autres en général. Nous devons tellement à nos parents ; comment le leur rendre sans être infiniment endettés ? Nous devons tellement à la société qui nous a formés ; comment pourrions-nous rembourser ? Nous devons tellement à ceux qui nous ont aimés, qui ont pris soin de nous ; comment leur rendre tout cela ? C’est impossible. Et souvent c’est lourd, c’est pesant. Mais avec Dieu, c’est tout le contraire, c’est joyeux, c’est léger, c’est libérateur.
Dieu est un véritable rédempteur, entendez : quelqu’un qui rachète vraiment les dettes. Pas comme les Cetelem, Mediatis, Empruntis et autres charognards qui ne rachètent pas les dettes, contrairement à ce qu’ils annoncent, mais vous échangent juste vos dix petites chaînes en acier contre une grosse chaîne blindée en fonte. Merci pour votre aide.
Dieu est celui qui rachète vraiment. Il l’a montré en Jésus-Christ, qui a tout pris sur lui, qui a tout payé, non seulement pour les générations qui précédaient mais encore pour les générations qui suivraient. C’est justement sur la croix qu’il a prononcé cette ultime décision quant à nos créances, nos découverts et nos aggios : « Remets-leur leurs dettes, car ils ne savent pas ce qu’ils font ».
Dieu est le seul qui ne substitue pas une grosse chaîne aux nombreuses petites que nous portions. Il ne substitue pas un esclavage lourd à la multiplicité de nos petites servitudes. Ses fardeaux sont légers. Dieu nous sort du marché aux esclaves. Il vient nous retirer des turbulences d’un marché où les vies s’échangent comme des marchandises, où la liberté n’existe plus car elle est toujours achetée. Le marché aux esclaves, on y est échangé, troqué, mais on n’y entre toujours pour en ressortir avec une chaîne différente. En Jésus-Christ Dieu nous sort de cette toile d’araignée spirituelle. Il nous fait sortir de la servitude non plus pour être des esclaves qui subissent la loi et les caprices d’un nouveau maître, mais il nous fait sortir de la servitude pour nous offrir la liberté du service. Le chrétien n’est l’esclave de personne, mais il est le serviteur volontaire de tous. Parce qu’il sait qu’il doit tout à son Dieu.
Il sait qu’il doit tout… et il sait qu’il ne doit rien ; qu’il n’a rien à rembourser.
C’est réglé.
Seigneur, éloigne de nous nos dettes car toi seul peut les éloigner effectivement de nous, pas pour les pousser juste un peu plus loin, pas pour faire comme si elles n’existaient plus, pas pour les renforcer par des manipulations secrètes, mais bien pour les briser pour toujours.
Amen

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