Surmonter un traumatisme psychologique par la résilience en Christ : l’exemple de Corrie ten Boom
Par Claude
Pour décrire les processus de réparation de soi après un traumatisme psychologique, on parle couramment de “résilience”. La vie de Corrie ten Boom atteste d’une forme de “résilience”, nécessairement victorieuse : la résilience en Christ. Equipée de l’amour de Dieu, Corrie put, après le temps des souffrances, témoigner et porter le message de réconciliation et de pardon.
Chronique d’une famille chrétienne (presque) ordinaire
Les ten Boom étaient une famille néerlandaise qui vivait dans la ville d’Haarlem, où ils tenaient une boutique d’horlogerie. Membres de l’église réformée, les ten Boom vivaient leur foi chrétienne au quotidien. Ainsi, quand Corrie fonda des clubs de randonnée, de théâtre, de gymnastique, pour les jeunes filles de sa ville, elle chercha toujours à sensibiliser les participantes à l’amour de Dieu.
Dans cette famille, on aimait son prochain : on accueillait et on aidait fréquemment des hommes et des femmes dans le besoin et dans la peine.
Le pasteur Willem ten Boom, frère de Corrie, gérait une maison de santé pour personnes âgées. Dans les années 1930, cet établissement devint un refuge pour les Juifs fuyant les persécutions antisémites en Allemagne.
Après le début de la guerre et de l’occupation allemande, des lois toujours plus iniques accablèrent les Juifs néerlandais et les isolèrent du reste de la société. Lorsque le port de l’étoile de David leur fut imposé, Casper, le père de Corrie, voulut porter l’étoile, lui aussi… Corrie et sa soeur Betsie réussirent à l’en dissuader, en lui faisant valoir qu’il y avait d’autres moyens d’aider les Juifs que de se faire emprisonner.
Et les ten Boom aidèrent des Juifs, en les cachant chez eux. Pour ce faire, ils firent construire dans leur maison une chambre secrète, indécelable en cas de perquisitions. Fin février 1944, lorsque la Gestapo, suite à une dénonciation, fit une descente dans la maison, les six personnes qui y étaient cachées, des Juifs et des résistants, ne furent pas découvertes, mais la famille ten Boom fut arrêtée.
Lors de l’interrogatoire de Casper, l’officier de la Gestapo proposa au vieil homme de le relâcher, moyennant la promesse qu’il ne se livrerait plus à des activités secrètes. La réponse de Casper fut sans ambages : « Si vous me laissez partir, demain matin j’ouvrirai de nouveau ma porte à quiconque aura besoin de mon aide. Et je dois dire que je vous plains : lorsque vous arrêtez un Juif, vous touchez à la prunelle même de l’oeil de Dieu. »
Quand un traumatisme psychologique extrême est vaincu par l’amour de Dieu
Casper ten Boom mourut 10 jours après son arrestation, 10 jours pendant lesquels il récita en boucles le Psaume 91 : « Celui qui habite sous l’abri du Très-Haut, repose à l’ombre du Tout-Puissant… »
D’abord incarcérées aux Pays-Bas, Corrie et sa soeur Betsie furent transférées, en septembre 1944, au camp de concentration pour femmes de Ravensbrück, au nord de Berlin.
A Ravensbrück, Corrie et Betsie connurent l’abîme des ténèbres… Mais, comme l’a écrit Corrie après la guerre : « Peu importe quelle est la profondeur de nos ténèbres, Il sera toujours là. »
A Jérusalem, le jour de la Pentecôte, l’église de Christ avait reçu sa “feuille de route”, quand les nouveaux disciples acceptèrent la parole de Pierre : « Ils persévéraient dans l’enseignement des apôtres, dans la communion fraternelle, dans la fraction du pain et dans les prières. » (Actes 2:42).
A Ravensbrück, Corrie et Betsie firent vivre l’église de Christ : elles assurèrent clandestinement des études bibliques ; par une efficace chaîne de traduction, des femmes venues de toute l’Europe purent entendre l’évangile dans leur langue ; dans un dortoir infesté de poux où les surveillants ne venaient pas par peur d’être infectés, Corrie et Betsie conduisirent des moments de culte ; et puis, les deux soeurs prièrent, inlassablement.
Et le Seigneur entendit leurs prières. Ainsi, le jour où eut lieu une fouille corporelle de toutes les femmes, Corrie pria que la Bible cachée sous son vêtement ne fût pas découverte… et elle fut la seule à n’être pas fouillée, comme si elle eut été invisible aux yeux des gardiens !
« A Ravensbrück, la vie s’est déroulée sur deux plans distincts, a témoigné Corrie. D’un côté, il y avait la réalité tangible, la vie extérieure dont l’horreur croissait chaque jour. Et de l’autre, la vie cachée en Dieu, celle qui, vérité après vérité, victoire après victoire, progressait sans cesse . »
Finalement, la “feuille de route” de l’église de Christ est aussi celle de la résilience en Christ : en faisant église, jusque dans les extrémités de la détresse et de l’horreur, le chrétien peut continuer d’avancer, de marcher avec Dieu.
Usée par le travail et par les mauvais traitements, Betsie est morte en décembre 1944. Suite à une erreur administrative, Corrie fut libérée quelques jours après le décès de sa soeur et put rejoindre son pays.
De la résilience au ministère de la réconciliation et du pardon après un traumatisme psychologique
Suite à un traumatisme psychologique, il faut partager et ne pas rester silencieux, lit-on dans les ouvrages et revues vulgarisant le sujet. Corrie partagea et ne resta pas silencieuse…
Lorsque la guerre s’achève, Corrie a 53 ans. Dorénavant, son chemin est tracé : elle va parcourir le monde, prendre la parole dans plus de 60 pays, pour enseigner le message d’amour de Dieu pour l’humanité. Elle se sent envoyée en mission par les dernières paroles de sa soeur Betsie avant sa mort : « Corrie, nous devons leur dire qu’il n’existe pas d’abîme si profond que l’amour de Dieu ne puisse atteindre ! »
L’amour de Dieu pour chaque humain implique le double pardon, le pardon de Dieu pour chaque humain, mais aussi le pardon que chacun doit à son prochain : « Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés » Le pardon des offenses mineures, on y parvient à peu près. Cependant, lorsqu’il s’agit d’aimer nos ennemis et de leur offrir notre pardon, cela devient beaucoup plus difficile…
Corrie en fait l’expérience un jour, à la fin d’une réunion d’église à Munich. Un homme s’avance vers elle, il n’a pas reconnu Corrie, mais Corrie le reconnaît : c’est l’un des gardiens SS de Ravensbrück. L’homme remercie Corrie pour son message, lui tend la main, Corrie n’arrive pas à lever sa main pour serrer celle de son ancien geôlier. Pétrifiée, Corrie fait une prière silencieuse : « Jésus, je ne suis pas capable de lui pardonner. Accorde-moi ton pardon. »
Enfin, elle réussit à prendre cette main tendue, et il se passe quelque chose d’incroyable : « De mon épaule, tout au long de mon bras et à travers ma main, témoignera-t-elle, un courant semblait passer de moi à lui, tandis que, dans mon coeur, a surgi un amour pour cet inconnu qui m’a bouleversée. »
En écho à cette rencontre, Corrie ten Boom pourra écrire plus tard : « Vous n’aurez jamais autant touché l’océan de l’amour de Dieu que lorsque vous aurez pardonné et aimé vos ennemis. »
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Sur sa vie et sur sa foi, Corrie ten Boom (1892-1983) a écrit plusieurs ouvrages, dont le plus connu s’intitule « The Hiding Place « (La Cachette).