Comment aider les adolescents à grandir dans leur spiritualité ?
Ah les ados ! Vaste sujet. On les aime, même s’ils nous tapent “parfois” sur le système, et bien souvent, on ne sait pas comment interagir avec eux. Ils provoquent, nous poussent dans nos retranchements et quand on veut les aider à traverser leurs crises existentielles, on se retrouve face à un mur. J’ai longtemps organisé des séjours de vacances pour ado dans le cadre de l’Eglise et en discutant avec d’autres personnes engagées dans la jeunesse j’ai remarqué que beaucoup n’aimaient pas le public ado car trop compliqué à gérer. Pour ma part, je pense qu’on oublie bien vite qu’on a été ado et qu’on a vécu cette période remplie de découvertes fascinantes mêlées à un mal-être plus ou moins profond. A ce titre, les adultes entourant les ados ont tous un rôle d’aidant à jouer. Pour jouer ce rôle, on peut se poser trois questions : comment aider (ou les basics de la relation d’accompagnement) ? Comment aider un ado ? Comment aider les ados plus particulièrement dans leur spiritualité ?
1. Comment aider ?
Le sujet est vaste mais j’aimerais ici rappeler quelques bases de la relation d’aide et d’accompagnement. Je parle ici de moments plus particuliers de discussions avec une personne qui ne va pas bien, dans un cadre non formel (hors thérapie et accompagnement pastoral). Je vous dresse une petite liste mais le sujet vaut le coup d’être creusé par ailleurs :
- Écouter : l’enjeu premier est de libérer la parole, d’aider à verbaliser ce qui n’a peut-être jamais été verbalisé. Accepter les temps de silence, ne pas réagir ou débattre mais plutôt accueillir. On peut reformuler ce qu’on pense avoir compris ou poser des questions.
- Ne pas juger : cette attitude va créer l’espace où la parole va pouvoir émerger. C’est particulièrement important avec un public ado souvent bourré de complexes.
- Doser le conseil : il est tellement tentant de partager les recettes qui ont fonctionné pour nous ! Or, être trop dans le conseil pourrait limiter la parole de la personne accompagnée et peut-être même faire peser un esprit de jugement du genre “tu ne sais pas y faire, je vais te dire, moi qui sais tout, comment mieux faire”. Mais je crois qu’il ne faut pas s’empêcher de donner des conseils, après un bon temps d’écoute. Il faut juste rester sobre et savoir doser.
2. Comment aider les adolescents ?
L’adolescence est avant tout un moment de crise. Une croissance accélérée ou les besoins d’enfants se mêlent sans harmonie avec une quête d’indépendance. Il est important d’avoir ça en tête pour comprendre que les moments de conflits sont avant tout les symptômes de cette période inconfortable de transition. Cela doit nous conduire à avoir du recul et à toujours sentir la crise derrière les attitudes rebelles. Voici quelques conseils pour accompagner un ado :
- Valoriser : plus qu’à n’importe quel âge, le besoin d’être accepté, valorisé et reconnu est important. L’identité est en pleine construction et le doute est constant, malgré parfois des apparences trompeuses (comme une certaine assurance dans le comportement). Dans votre relation avec un ado, il est bon de lui renvoyer une image positive. Mais attention, soyez sincères. Les ados sont très forts pour détecter les faux semblants.
- Témoigner : rappelez-vous avec lui/elle des crises que vous avez traversées. Une bonne solution pour éviter le conseil surplombant ! Et puis, cela enverra ce message : “c’est normal d’aller mal, de se poser des questions, de contester, je suis aussi passé par là”. Vous serez un peu plus à égalité dans la relation.
- L’humour : c’est bien connu, les ados ont cette tendance à “glousser” à longueur de temps. Aller sur le terrain de l’humour, c’est une façon de les rejoindre et de dédramatiser. À bien doser, évidemment.
- Aider sans avoir l’air d’aider : eh oui, un ado n’a, de son point de vue, aucune aide à recevoir de personne. Il est fier, libre, indépendant. Je grossis un peu le trait mais on est pas loin de ça. N’hésitez pas à déployer votre accompagnement dans un cadre original et peu formel. Je peux vous donner un exemple qui m’a marqué : lors d’un séjour de vacances, j’ai abordé en anglais une jeune qui était isolée du groupe lors de la fête du dernier jour. C’était spontané et sans stratégie de ma part. Il se trouve qu’on a parlé plus d’heure de ses difficultés, en anglais toujours. La langue étrangère a permis de mettre de la distance.
3. Comment aider les adolescents à grandir dans leur spiritualité ?
Selon moi, le plus grand piège lorsque l’on souhaite transmettre notre foi, consiste à mettre une pression, une attente. Il faut vraiment partir du principe que la foi est une libre adhésion et que souvent, pour en arriver à ce choix, on passe par des contestations, des questions, des crises. L’enjeu est donc de mettre en place un cadre où la foi peut s’exprimer tout autant que le doute ou la non foi. Le pire scénario c’est que l’ado donne le change pour faire plaisir à l’adulte et ne passe pas par une expérience personnelle. Pour poser ce cadre, il faut le verbaliser : “tu peux dire tout ce que tu penses / Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse”.
Un autre point qui me semble important c’est de témoigner en actes. Les ados sont hyper sensibles aux incohérences et si les paroles de celui qui témoigne de sa foi ne sont pas traduites dans le concret, ils le sentiront et parfois même le diront de manière assez directe. Ne passez pas votre temps à parler de l’amour de Dieu, soyez cet amour de Dieu qui habite en vous. Acceptez également, dans vos discours, que vous n’êtes pas toujours en phase avec vos convictions et que oui, vous êtes pécheurs et imparfaits.
Enfin, un dernier point qui me semble capital : donner des responsabilités spirituelles aux adolescents ! Un ado peut prier, prêcher, animer un temps de réflexion biblique, témoigner, servir dans l’Eglise. Selon l’Evangile, il n’y a pas “ceux qui savent” et “ceux qui ont tout à apprendre”. Il n’y a que des serviteurs imparfaits qui font ce qu’ils peuvent et qui ne réussissent que grâce à l’Esprit Saint qui souffle en eux. Cela leur permettra de se sentir acceptés et valorisés. Et puis, ils risquent fort de nous enseigner par leur paroles ou leurs actes. C’est comme ça que je me suis fait surprendre par un temps d’enseignement donné par un jeune de 19 ans. A la base j’étais réticent à lui donner cette responsabilité. Finalement, son enseignement était très inspirant, simple, vrai, profond et enraciné dans la Bible. Faisons donc confiance et partageons les responsabilités car Dieu utilise chacun avec ses talents et au-delà de ses faiblesses.